Le budget 2025 est sous les feux de la rampe après de multiples rebondissements ayant démarré dès le début de l’automne dernier. L’activation de l’article 49.3 par le Premier ministre François Bayrou place ce projet financier au centre du débat politique, puisque l’Assemblée nationale doit à présent se prononcer sur une motion de censure. Les observateurs indiquent que la décision du Parti socialiste de ne pas renverser le gouvernement conforte la probabilité d’adoption du texte. Il faut dire que cette séquence budgétaire est exceptionnelle en raison de la succession de deux Premiers ministres, Michel Barnier puis François Bayrou, engagés dans l’un des exercices les plus sensibles de la Ve République : dessiner la politique budgétaire de la France pour l’année à venir.
Les échanges autour du projet de loi de finances se sont étendus bien au-delà du calendrier habituel, reflétant l’étendue des attentes. Les citoyens guettent de près l’issue des arbitrages concernant l’impôt sur le revenu, le chèque énergie, le PTZ ou encore l’évolution des droits de donation.
Un barème d’impôt indexé à 1,8%
L’une des principales annonces concerne l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu. Alors que la première mouture du texte prévoyait un ajustement de 2% sur la base de l’inflation prévisionnelle, le gouvernement a finalement retenu une réévaluation de 1,8%. Ce choix s’appuie sur le dernier indice hors tabac publié par l’Insee, légèrement plus modéré que l’inflation « classique ». Concrètement, la revalorisation des seuils d’imposition permet d’éviter que des ménages jusque-là non imposables basculent automatiquement vers l’imposition, ce qui aurait pu se produire avec une simple stagnation du barème.
Le nouveau taux, bien que plus faible que celui anticipé par certains parlementaires, se veut cohérent avec l’objectif de maintenir un niveau de recettes fiscales stable tout en limitant l’impact sur les foyers les plus vulnérables. Les estimations publiées dans la presse indiquent qu’environ 600 000 foyers continueraient ainsi à échapper à l’impôt sur le revenu grâce à cette revalorisation ajustée.
Une contribution différentielle sur les hauts revenus provisoire
L’autre élément notable, relatif aux ménages les plus aisés, est la reconduction d’une contribution différentielle à hauteur de 20% pour les foyers disposant de revenus ou de patrimoines élevés.
Baptisée CDHR, cette mesure vise à garantir qu’un niveau minimal d’impôt soit acquitté par ceux qui bénéficient d’importants revenus du capital ou qui détiennent un patrimoine conséquent. La ministre chargée des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a toutefois précisé en janvier que ce dispositif, s’il est maintenu pour 2025, ne constitue pas une solution pérenne. L’exécutif annonce en effet son souhait de mettre en place une nouvelle approche qui découragerait certaines stratégies d’optimisation. Dans les semaines à venir, des concertations doivent être menées avec les acteurs concernés, afin d’élaborer un mécanisme qui tienne compte de la diversité des formes de revenus, y compris les dividendes et les plus-values mobilières.
Une hausse ciblée des droits de mutation
Le texte conserve également une mesure déjà évoquée dans la version précédente du projet : la possibilité pour les collectivités locales d’augmenter de 0,5 point les droits de mutation à titre onéreux (DMTO).
Souvent qualifiés de « frais de notaire », ils représentent une source de financement non négligeable pour les départements. Cette majoration éventuelle ne sera cependant pas appliquée à tous les achats immobiliers de la même façon.
Les primo-accédants, c’est-à-dire ceux qui achètent pour la première fois leur résidence principale, devraient bénéficier d’une exonération partielle ou totale de cette augmentation. L’idée est de soutenir l’accès à la propriété en ménageant le pouvoir d’achat de ceux qui découvrent le marché immobilier. Les associations spécialisées dans le logement saluent ce geste, tout en restant attentives à la mise en application concrète dans chaque département, car la décision revient in fine aux collectivités territoriales.
Vers la fin d’un avantage pour les meublés locatifs
Un autre sujet discuté par les parlementaires porte sur la fiscalité des locations meublées.
Le dispositif qui permettait de déduire fiscalement des amortissements sur le bien, puis de réduire la plus-value lors de la revente, arrive à son terme dans la version finale du budget.
Concrètement, l’administration fiscale va réintroduire les amortissements précédemment déduits dans le calcul de la plus-value, ce qui augmente l’imposition au moment de la cession. Cette modification s’aligne sur l’envie de corriger certaines disparités fiscales, tout en envoyant un signal vers un traitement plus homogène des différents types de bailleurs. Les gestionnaires de logements meublés devront ainsi adapter leurs stratégies patrimoniales s’ils souhaitaient profiter d’une fiscalité particulièrement avantageuse.
Un PTZ élargi à tout le territoire
Autre dispositif très attendu : le prêt à taux zéro (PTZ).
Jusqu’à présent, il se limitait presque exclusivement à l’acquisition de logements situés en zones dites « tendues » et uniquement pour les achats dans l’habitat collectif neuf.
Le nouveau texte étendrait ce prêt avantageux à l’ensemble du territoire pour les primo-accédants, aussi bien dans l’habitat collectif que dans l’habitat individuel. Cette perspective, déjà esquissée lors des précédentes discussions, avait fait l’objet de nombreux amendements que la censure parlementaire n’avait pas permis de finaliser. Si le budget est finalement adopté, ce coup de pouce encouragera davantage de ménages à se lancer dans l’achat d’une maison ou d’un appartement, en limitant le coût du financement. Les spécialistes du marché immobilier prévoient que cette extension pourrait doper les transactions dans certaines zones moins denses, où les aides étaient jusqu’alors limitées.
Des donations exonérées pour encourager l’accès à la propriété
Le texte issu de la commission mixte paritaire introduit une nouveauté concernant les donations familiales destinées à l’achat ou la construction d’un logement. Les parents ou grands-parents qui souhaitent soutenir leurs enfants ou petits-enfants en leur donnant une somme d’argent voient une partie de ce don exonérée de droits de mutation.
Le plafond s’établit à 100 000 euros par donateur, dans la limite de 300 000 euros par donataire, pour financer directement un projet immobilier ou des travaux de rénovation énergétique. En pratique, cette disposition se superpose aux abattements déjà en vigueur, ce qui peut permettre aux familles disposant d’une capacité financière conséquente d’aider leurs proches à accéder à la propriété sans alourdir leur charge fiscale. Les experts estiment que ce coup de pouce familial renforcera l’épargne transmise d’une génération à l’autre, dans un contexte où les jeunes actifs peinent parfois à rassembler l’apport initial pour un achat immobilier.
Un coup de rabot sur le chèque énergie
La question du chèque énergie est également présente dans la version du budget 2025. Conçu pour soutenir les ménages modestes dans le règlement de leurs dépenses énergétiques, son montant varie aujourd’hui de 48 à 277 euros.
Or, la suppression progressive de la taxe d’habitation a entraîné des modifications de la base de calcul, ce qui a perturbé l’éligibilité de nombreux foyers. Désormais, une nouvelle adaptation est prévue : l’utilisation du chèque pour financer des travaux de rénovation énergétique ne sera plus possible via l’échange contre un chèque travaux. Jusqu’ici, cette option offrait un coup de pouce aux propriétaires souhaitant améliorer la performance énergétique de leur logement. Le gouvernement souhaite privilégier une forme d’aide plus ciblée, sachant que d’autres dispositifs (MaPrimeRénov’ et divers programmes pilotés par l’Agence nationale de l’habitat) restent accessibles pour ce type de projets.
La question du 49.3 polarise les débats
Techniquement, si la motion de censure est rejetée, le budget 2025 sera adopté dans sa version actuelle, intégrant l’indexation de 1,8% sur le barème d’impôt, l’élargissement du PTZ, les modifications du chèque énergie et la contribution différentielle pour les plus hauts revenus.
Si, en revanche, la motion passait, le gouvernement Bayrou devrait démissionner et l’adoption du budget serait remise en cause. Cependant, la décision annoncée par les socialistes de ne pas soutenir une censure à ce stade semble offrir une marge de sécurité. Au-delà du simple vote, l’adoption éventuelle de ce budget laisse entrevoir des évolutions qui concernent un large panel de contribuables.
Ce budget, s’il franchit la barrière du 49.3, ouvrira la voie à diverses évolutions qui, in fine, impacteront fortement le quotidien des ménages, des investisseurs et des collectivités locales sur le long terme.
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