Salaire : combien d’argent faut-il gagner pour être heureux ? Réponse de Christian Junod

Modifié le - Auteur Par Nantcy L -
Salaire : combien d’argent faut-il gagner pour être heureux ? Réponse de Christian Junod

INTERVIEW. Les connexions entre argent et bonheur font l’objet de multiples études. Existe-t-il un seuil de revenus conduisant à la voie du bonheur ? Éléments de réponse avec Christian Junod, expert de la relation à l’argent.


Le bonheur s’achète-t-il ? « Si l’argent fait partie de notre quotidien, personne ne nous enseigne comment l’apprivoiser », constate Christian Junod, ancien banquier, conférencier et formateur. Or, « poser un regard serein sur l’argent » n’est pas aisé. Ceux ayant des difficultés à boucler les fins de mois peuvent en témoigner, tout comme ceux qui ne peuvent en parler sans être angoissés. Ce sujet, encore tabou, est en effet souvent source de stress. D’ailleurs, « la peur d’en manquer est la problématique n°1 », nous assure l’auteur du livre Le défi des 100 jours pour libérer son rapport à l’argent et vivre son abondance. Cette crainte a-t-elle un rapport quelconque avec notre niveau de compte en banque ?

Argent : quelle corrélation entre niveau de richesse et de bien-être ?

Économie, psychologie… Différentes études se sont penchées sur les liaisons entre le niveau de richesse et de bien-être. Existe-t-il alors un seuil optimal de revenu ?

Argent : la joie se stabiliserait à 75 000 dollars

On ne peut le nier : la grande pauvreté est synonyme d’importantes difficultés matérielles ou sociales. Elle est aussi associée à un épuisement ou à une mauvaise santé. Autant d’éléments incompatibles avec la quiétude et le bonheur. Gagner plus peut ainsi contribuer à un mieux-être ?

D’après un rapport publié au sein de Proceedings of the National Academy of Sciences, et relayé par le Washington Post en mars derniers, il existerait un seuil de revenu optimal au-delà duquel le niveau de contentement ne progresse quasi plus. En effet, les scientifiques Daniel Kahneman et Matthew Killingsworth « infirment l’idée dominante selon laquelle les gens sont généralement plus heureux à mesure qu’ils gagnent plus d’argent, mais que leur joie se stabilise lorsque leurs revenus atteignent 75 000 dollars ». Cela équivaut à 68 888 € à fin août 2023.

Ainsi, d’après leurs conclusions, « le bonheur continue d’augmenter avec le revenu, même dans la fourchette haute des revenus ».

Autre fait étonnant, pour 20 % des participants à l’enquête, « le malheur diminue avec l’augmentation des revenus jusqu’à un certain seuil, puis ne progresse plus », détaille le journal américain. Leur « souffrance » pourrait même s’amenuiser lorsque le salaire augmente jusqu’à environ 100 000 dollars, mais « très peu au-delà ». En revanche, certains « malheurs », comme un chagrin d’amour, un deuil ou encore une dépression, ne peuvent « généralement pas être atténués par un gain d’argent ».

 

Toutefois, pour Christian Junod, ces chiffres ne sont que théoriques. « En pratique, ce type de calcul, qui définit un revenu médian (et divise donc une population en deux groupes égaux, NDLR) ne sert pas à grand-chose. Car en fonction des individus, ces montants sont estimés insuffisants, et pour d’autres, trop élevés. »

D’autre part, « en généralisant, on s’aperçoit qu’un important différentiel de revenus amène un niveau de satisfaction plus élevé, dès lors qu’on a peu de revenu (passer de 20 000 à 50 000 € annuels par exemple). Or, un multimillionnaire qui gagne 100 000 € de plus ne verra pas sa vie, ni son bonheur changer », explique l’expert.

Argent : une joie qu’éphémère ?

Dans notre société de consommation, l’argent est une ressource vitale, puisqu’il nous permet de subvenir à nos besoins essentiels (se loger, se nourrir, se vêtir, se soigner…). En gagner assez pour couvrir les dépenses contraintes nous apporte une sécurité nécessaire à notre quotidien.

« Gagner plus d’argent permet, certes, d’amener un réel mieux être, d’avoir un meilleur confort (matelas plus agréable, nouvelle voiture…), ou de moins se préoccuper des factures, mais la joie n’est à mon sens qu’éphémère. Elle durera plusieurs semaines, puis retombera. Je ne suis pas certain que cela rende plus heureux », pointe l’auteur de Ce que l’argent dit de vous.

 

L’argent fait-il vraiment le bonheur ?

Le proverbe « l’argent ne fait pas le bonheur, mais il contribue » se vérifie-t-il ?

L’argent peut seulement contribuer au bonheur

« J’entends souvent cet adage, qui n’est, pour moi, vrai que dans la nuance qu’il met en exergue. L’argent peut uniquement contribuer au bonheur. Tout est dans le ‘il peut’. Par mon expérience, je peux vous assurer que certains possèdent des millions à ne plus savoir quoi en faire et ne sont pas contents pour autant. Les milliardaires ont parfois des comportements très irrationnels et émotifs envers l’argent et craignent d’en manquer. Or, la peur ne peut rendre heureux », déclare Christian Junod.

Et d’ajouter : « Des personnes qui ont par exemple perçu un héritage et qui croient ne pas être capables de bien gérer ce nouveau patrimoine seront soucieux », confie celui qui a accompagné des gagnants à l’EuroMillions, pas forcément plus heureux.»

« Seule la manière d’utiliser l’argent rend heureux »

« Selon ma longue expérience, « l’argent seul ne pourra jamais amener au bonheur. Seule la manière de l’utiliser rend heureux », confesse-t-il. « Si je possède tous mes deniers en cash, tant que je ne les utilise pas, ils n’auront aucun effet. En revanche, faire des dons à des associations, aider ses enfants à acheter un logement, offrir des vacances à sa famille ou se faire plaisir amène de la joie. Être heureux de manière durable est néanmoins difficile, dès lors que l’on ne travaille pas sur ses croyances limitantes, ses craintes et son rapport à l’argent. Quant au bonheur matériel, il n’est qu’une coquille vide si l’on ne se sent pas bien. Un manque d’amour ne peut par exemple pas être comblé par du matériel », note l’expert de la relation à l’argent en francophonie.

Bonheur : « L’essentiel ne s’achète pas »

« L’essentiel qui circule dans notre vie – l’amour de l’entourage et de soi, la qualité de nos relations, notre capacité d’émerveillement – ne s’achète pas. En fin de vie, personne ne regrette de ne pas avoir eu plus d’argent, l’essentiel de la vie se situe à un autre endroit. Quand il y a de l’essentiel, nous avons plus de gratitude pour l’important (une maison, une voiture, un bon lit, etc.). Ce n’est que du plus. Les expériences de la vie ne se monnayent pas », affirme-t-il.

Amour, amitié, partage, tolérance… Le bonheur dépend-il finalement de notre manière de nous ouvrir à d’autres richesses et de nous-même ?

« Oui, c’est tout à fait ça. En nommant nos richesses intérieures (savoir-faire et savoir-être), nous pouvons voir ce que nous sommes déjà. Et cela fait une énorme différence. Se sentir bien avec soi-même et avec les autres permet de ne pas compenser avec de l’argent à l’extérieur. C’est tout un cheminement », conclut-il.

Par Nantcy L

Journaliste plurimedia depuis 15 ans, je m'intéresse à différents univers : économie, lifestyle, société, culture, psycho & développement personnel... Pour Comparateurbanque.com je vous livre, à l'aide d'experts, des conseils pour mieux gérer votre argent.

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