Le système SWIFT, ou Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication, est une infrastructure financière omniprésente, facilitant les paiements internationaux entre banques depuis plus de 40 ans. Il s’agit d’une plateforme sécurisée qui permet d’effectuer des transactions interbancaires, représentant l’épine dorsale des échanges financiers mondiaux. Cependant, à l’ère de l’évolution numérique rapide et des tensions géopolitiques permanentes, la question de sa pertinence se pose plus que jamais. La Russie, soutenue par les autres pays du bloc BRICS, affirme que SWIFT pourrait devenir obsolète et défend l’idée de solutions alternatives. Mais ces alternatives peuvent-elles réellement remettre en cause le système SWIFT à l’échelle mondiale ?
La remise en question du système SWIFT
La Russie a été en grande partie exclue du réseau SWIFT en 2022 lors de la mise en place de sanctions internationales à son encontre. Mais la déconnexion au réseau d’un pays telle que la Russie a révélé les vulnérabilités du système SWIFT, dont la dépendance aux États-Unis et à l’Occident. Depuis, la Russie s’est efforcée de développer ses propres solutions de paiement transfrontaliers, telles que le Système de messagerie financière de la Banque de Russie (SPFS), qui permet aux banques russes de continuer à échanger des informations financières sans passer par SWIFT. En 2023, ce système avait déjà attiré 556 participants provenant de 20 pays différents.
Anatoly Aksakov, président du Comité des marchés financiers de la Douma d’État russe, a récemment affirmé que SWIFT était une technologie en déclin, qu’il est désormais plus raisonnable de remplacer par des technologies numériques et des instruments cryptographiques. Selon lui, SWIFT pourrait bien devenir obsolète si ce système n’évoluait pas pour s’adapter aux nouvelles réalités économiques. La Russie, tout comme la Chine, l’Inde et d’autres membres des BRICS, plaide en faveur de solutions alternatives qui ne dépendent pas des États-Unis ou d’un système financier occidental.
Diversifier les systèmes de paiement mondiaux
Au-delà de la Russie, les pays membres des BRICS — Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud — ont également pris des mesures pour réduire leur dépendance vis-à-vis du dollar américain et des institutions financières dominées par l’Occident. Dans un contexte où la Chine et l’Inde multiplient les transactions en yuan et en roupies pour les échanges bilatéraux, l’intérêt pour des alternatives à SWIFT se renforce.
Le bloc BRICS s’est engagé à promouvoir les échanges commerciaux dans leurs monnaies nationales et explore la création d’un système de paiement multilatéral qui pourrait concurrencer SWIFT. En 2023, des discussions ont été lancées sur un système de messagerie financière commun, visant à interconnecter les réseaux domestiques de chaque pays tout en supprimant les dépendances vis-à-vis des infrastructures financières dominées par les États-Unis.
La Chine, par exemple, a développé le CIPS (Cross-Border Interbank Payment System), un système alternatif de paiements transfrontaliers qui permet de régler les transactions internationales en yuans, sans passer par SWIFT. De même, l’Inde et le Brésil ont aussi cherché à renforcer leurs systèmes de paiements en monnaie locale, réduisant ainsi leur exposition au dollar et aux risques liés aux fluctuations des devises étrangères.
Vers un nouveau système décentralisé grâce aux cryptomonnaies ?
En plus des efforts des BRICS pour établir un système de paiement commun, un autre facteur de disruption pourrait être l’émergence des cryptomonnaies. La blockchain, technologie sous-jacente des cryptomonnaies, offre une alternative décentralisée aux systèmes de paiements traditionnels comme SWIFT, permettant des transactions directes entre les parties sans intermédiaires. L’essor des stablecoins et des solutions basées sur la blockchain pourrait bouleverser la manière dont les paiements internationaux sont effectués.
La Russie, par exemple, explore activement les paiements en cryptomonnaies pour ses échanges avec certains partenaires internationaux. Bien que ces solutions ne soient pas encore largement adoptées par les grandes économies, elles représentent un signal fort que la tendance à la décentralisation pourrait remettre en cause les systèmes actuels. Dans ce cadre, l’initiative des BRICS pour développer une monnaie commune pourrait également inclure des composantes numériques, appuyées par la blockchain, afin de contourner les intermédiaires traditionnels comme SWIFT.
L’indépendance financière en question
Le bloc BRICS, qui représente aujourd’hui un quart du PIB mondial et 40% de la population globale, a un poids économique considérable. En réorientant les échanges commerciaux en dehors des canaux traditionnels dominés par les États-Unis et l’Europe, ces pays cherchent à obtenir une plus grande souveraineté économique. Le développement de solutions alternatives aux systèmes de paiements existants est donc une stratégie clé pour ces nations, en particulier face à un système SWIFT de plus en plus politisé et exposé aux sanctions internationales.
L’idée de se libérer de l’influence occidentale est un but recherché par de nombreux pays et il a conduit la Russie, la Chine et d’autres à renforcer leurs propres infrastructures financières, à encourager la coopération économique multilatérale et à tester de nouvelles technologies pour faciliter les transactions internationales. Mais que ce soit par l’introduction de technologies disruptives ou par l’adoption de solutions plus décentralisées, l’avenir des paiements internationaux sera sans doute marqué par de profonds changements et la crypto pourrait une nouvelle fois servir de dynamite.
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