Philippe Brassac, directeur général de Crédit Agricole S.A., a présenté le 15 mai les résultats du 1er trimestre 2019 du Crédit Agricole S.A. L’annonce est très optimiste avec de « bonnes performances dans tous les pôles métiers ». En effet, une partie de résultats sont motivants mais le marché boursier ne l’entend pas de la même oreille. L’action enregistre le même jour, le plus fort recul du CAC40.
Que peut-on vraiment penser de l’état financier du Crédit Agricole ?
La présentation des résultats trimestriels faite par Philippe Brassac est claire : « Tout est au vert ». Ce qui est une bonne nouvelle pour la banque verte. Rappelons que, le Crédit Agricole se classe dans les 10 plus grands organismes bancaires au monde.
Faire parler les chiffres :
Le résultat net du Groupe mutualiste est de 763 millions d’euros, sur le 1er trimestre 2019, contre 856 millions en 2018. Ceci représente dans les faits un recul de 10,9%. Mais cette baisse s’explique clairement et cache en fait une hausse sensible de 1%.
La baisse est en fait une hausse
Voici les éléments qui expliquent ce faux semblant :
- Les éléments spécifiques ayant eu un effet négatif de -33M€ sont : La variation des provisions épargne logement pour -13M€, l’ajustement de la valeur de la dette (DVA) pour -6M€, la couverture des portefeuilles de prêts pour -14M€.
- L’ajout au premier trimestre 2018 de +68M€ pour le montant de badwill* (Le Badwill est l’écart entre le montant d’achat d’une société et sa valeur réelle) issus de : l’acquisition de trois banques italiennes pour +66M€, des frais d’intégration de Pionneer pour -4M€ et de la récurrence de la volatilité comptable pour +6M€.
Sans tenir compte des éléments spécifiques, le résultats aurait été de 796M€ en 2019 et 788M€ en 2018. Il y a donc bien une hausse, même si elle est sensible et qu’elle n’est que de 1%.
Sanction immédiate de la Bourse
Les marchés n’ont pas compris les résultats de la même manière. Ils ont été intransigeants. L’action a dévissée de 2,51%, c’est la plus forte baisse du jour. L’action est passée au plus bas à 10,83€. Pour relativiser ce carton rouge, il est important de rappeler que depuis janvier l’action a pris +17% et que son niveau est quasiment revenu à la normale quelques heures après l’annonce.
Des faits concrets qui poussent la croissance :
Pour arriver au niveau de la Banque Verte, une stratégie long terme est indispensable. Le prochain plan sera présenté le 6 juin. La croissance est ici le résultat d’une cohérence et d’un bon niveau dans tous les pôles de métiers.
Si on se concentre sur les points forts les plus pertinents, il y a les entités qui participent à sa croissance :
Le LCL contribue à la croissance du Groupe
- La décision de renflouer les comptes du LCL en 2018 a été payante. La banque de réseau affiche de très bons résultats selon M. Brassac qui le confirme en disant : « Tous les métiers ont performé, y compris les marchés, et je tiens à souligner la très belle performance du LCL ». L’ex Crédit Lyonnais a acquis près de 20 000 nouveaux clients en 2019, ce qui est loin d’être le cas des autres banques de détail.
- L’annonce récente du lancement de l’offre « LCL Essentiel » pour séduire la nouvelle cible que toutes les banques s’arrachent : les jeunes, rajoute encore du positif. En effet, les banques de réseau ont une clientèle vieillissante et les plus jeunes se tournent vers les banques mobiles ou néobanques. Cette nouvelle offre devrait permettre une nouvelle embellie.
EKO atteint les 100 000 clients
- Les résultats de l’offre de la néo-banque EKO continuent leur croissance. Avec 15 000 ouvertures de comptes en 2019, l’entité atteint un niveau représentatif de 100 000 clients. L’objectif du Groupe est d’arriver à 500 000 clients en 5 ans.
- Lancée en 2017, cette solution simplifiée de la banque promet pour 2€/mois : une carte, une application mobile et un compte.
Le Crédit Agricole reste leader en France
La banque du Crédit Agricole (CA) conserve sa position de leader avec ses 39 caisses régionales. Ils détiennent 21millions de clients particuliers. Ils sont leaders sur : la bancassurance, les professionnels (1 entreprise sur 3 est au CA), les collectivités publiques, l’immobilier (un fort réseau immobilier) et les agriculteurs (près de 9 agriculteurs sur 10).
La diversification réussie
Aujourd’hui les revenus de la banque proviennent de 4 branches distinctes. Ces domaines d’activités variés sont les suivants :
- La banque de détail,
- La banque de financement,
- La gestion d’assurance et d’actifs,
- Les services financiers spécialisés comme le crédit à la consommation, le leasing ….
Les freins à surveiller
Les freins sont tous externes au Groupe, ils touchent donc l’ensemble des acteurs du marché.
La montée en puissance du digital
Le numérique met en branle l’univers de la finance, renommé Fintech. Les startup qui se lancent dans ce secteur juteux sont de plus en plus nombreuses et les fonds affluent pour les aider à se développer. Entre les GAFA, les BATX, les acteurs des télécoms et les startup les banques ont du fil à retordre.
La régulation européenne
La DSP2, la GRPD et les autres lois visant à faciliter l’ouverture à la concurrence sont rarement en faveur des banques traditionnelles. Ces nouvelles normes obligent de très lourds investissements financiers, humains et techniques. Cependant, les banques et les grosses organisations sont les plus à même à réaliser de tels investissements. C’est donc une barrière non négligeable pour les startup. Mais cela ralentit réellement l’évolution des banques.
Qu’en est il de BforBank ?
Cependant, une question subsiste dans cette annonce. Lors de la diffusion de ces résultats, le sujet de BforBank n’a pas été abordé. Surprenant car il s’agit quand même de la banque mobile du Groupe. Comme ses consoeurs, la banque en ligne est en croissance mais la rentabilité n’est pas encore au rendez-vous. Il aurait cependant été intéressant d’avoir quelques chiffres à son sujet. Espérons que la stratégie qui sera présentée en juin évoquera son futur.
Où en est BforBank ?
Aujourd’hui BforBank est la banque en ligne au visage humain. Ils ne se battent pas sur les primes offertes à l’ouverture du compte. Ils se concentrent sur la qualité de leur offre et des services apportés à leurs clients. Des investissements sont en cours, puisque l’application est en refonte. La stratégie annoncée fin 2018, parlait d’accentuer le côté relationnel, qui fait souvent défaut aux établissements en ligne.
En savoir plus sur BforBank et notre avis sur cette banque.
Sources :
– Le quotidien La Tribune et l’excellent article de Delphine Cuny
– Le magazine Capital
– Zone Bourse et son analyse du 14/05/19
– Le dossier de presse du Crédit Agricole