1143 euros. C’est ce que les Français déboursent en moyenne chaque mois pour leurs dépenses contraintes en ce début 2025. Cela représente 35% de leur revenu net mensuel, selon l’étude réalisée par CSA Research pour LesFurets. Une part massive, difficile à absorber pour des millions de foyers, dans un contexte où l’inflation a érodé le pouvoir d’achat et où les politiques publiques sont de plus en plus critiquées pour leur inefficacité et leur coût.
Comme le souligne un témoignage recueilli par Le Figaro, “je n’ai pas les moyens de vivre seul” : cette phrase résonne comme un cri d’alarme partagé par une partie grandissante de la population française.
Une étude solide pour prendre le pouls des finances des ménages
Réalisée en janvier 2025 auprès de 2059 personnes représentatives de la population française, l’étude conjointe CSA Research – LesFurets analyse avec précision le poids des dépenses contraintes, c’est-à-dire toutes les charges fixes et incontournables : loyer, crédits immobiliers, assurances, énergie, abonnements télécoms, transports, impôts et taxes, etc.
Ce poste budgétaire est considéré comme « subi », car il ne laisse que peu de place à l’arbitrage. Il grève directement le budget disponible pour les loisirs, l’épargne ou la consommation discrétionnaire. Ces dépenses sont devenues si lourdes que, pour beaucoup, il ne reste rien à la fin du mois.
Des postes de dépenses qui explosent
Le logement représente de loin la plus grosse part du budget contraint, avec 673€ par mois en moyenne. À cela s’ajoutent les assurances (128€), les frais de communication (103€), les transports (95€) et les charges énergétiques (66€). Dans certaines régions ou configurations familiales, la somme totale explose.
Par exemple, les 35-49 ans, souvent en pleine vie active avec enfants à charge, sont les plus exposés : ils doivent faire face à 1472€ de dépenses contraintes par mois, soit 46% de leurs revenus nets mensuels. Pour les couples avec deux enfants, ce montant atteint 1585€, un niveau jugé “insoutenable” par certains économistes.
La région la plus touchée ? Auvergne-Rhône-Alpes, où les ménages consacrent 1278€ chaque mois à ces charges fixes, soit 39% de leur revenu net. Les raisons évoquées sont multiples : loyers élevés, coût des transports en zones périurbaines et dépenses énergétiques importantes dans les logements mal isolés.
Des conséquences sociales visibles et inquiétantes
Face à ces contraintes financières, les choix deviennent douloureux. D’après l’étude, 64% des Français réduisent ou suppriment les dépenses liées aux loisirs, notamment les sorties, les voyages, ou les abonnements numériques.
Un répondant résume cette situation dans Europe 1 : « On annule le cinéma, les restos, les week-ends. Tout est devenu luxe ». Cette privation du non-essentiel affecte non seulement le moral des ménages, mais impacte aussi l’économie du loisir et du tourisme intérieur.
La conséquence directe : le taux d’épargne diminue, tout comme la capacité à investir ou à affronter un imprévu. Or, dans un climat économique tendu, cette fragilité rend les ménages plus vulnérables à l’endettement ou au basculement dans la précarité.
Une pression amplifiée par les politiques publiques
Les décisions étatiques ne sont pas étrangères à cette situation.
Plusieurs choix budgétaires récents sont critiqués pour avoir alourdi inutilement les charges des ménages :
- Hausse programmée de la fiscalité sur l’électricité : l’accise pourrait passer de 21€ à 50€ par mégawattheure, une mesure qui frapperait de plein fouet les factures des foyers, surtout les plus modestes.
- Augmentation du ticket modérateur dans la santé : le passage envisagé de 30% à 40% à la charge du patient pour les consultations pourrait mécaniquement faire grimper les complémentaires santé, et donc… les dépenses contraintes.
- Suppression d’aides ou absence d’indexation sur l’inflation de certaines prestations sociales, qui aggravent le décalage entre dépenses réelles et soutiens publics.
Au-delà, l’usage de l’argent public interroge. Des milliards d’euros sont investis dans des infrastructures ou projets sans rentabilité immédiate pour le citoyen lambda, tandis que des sommes colossales sortent du territoire national par le biais de transferts, d’aides à l’étranger ou de politiques européennes peu lisibles pour le contribuable.
Une précarité budgétaire qui s’installe dans la durée
Les indicateurs économiques montrent que la situation ne s’améliore pas. L’INSEE anticipe une croissance atone, sans réel effet de ruissellement sur les salaires. Et l’inflation reste présente sur certains postes, comme l’alimentation, les mutuelles ou l’assurance habitation.
Résultat : de plus en plus de Français vivent en “mode survie”, comme l’explique un agent immobilier interrogé par Le Progrès : « Des familles quittent Lyon pour aller dans des coins plus reculés, uniquement pour alléger leur loyer. Ce sont des gens avec des CDI, pas des cas sociaux. »
Ce que cela dit de la santé économique de la France
Le fait que plus d’un tiers des revenus soit absorbé par des charges fixes est un marqueur de tension extrême. Cela empêche les ménages de jouer leur rôle dans la relance économique par la consommation. Cela complique aussi tout projet d’investissement, de mobilité, ou d’entrepreneuriat.
Dans un tel contexte, les entreprises doivent revoir leurs stratégies salariales, sous peine de voir partir des talents ou de souffrir d’une démotivation interne liée aux pressions budgétaires personnelles de leurs collaborateurs.
Une urgence budgétaire nationale
Les dépenses contraintes deviennent un indicateur plus pertinent que l’inflation elle-même pour juger de la santé financière réelle des Français. Cette pression, qui s’intensifie chaque année, traduit une forme de déséquilibre budgétaire à la fois personnel et national.
Face à cela, le pilotage politique doit impérativement évoluer : recentrer les dépenses de l’État sur l’essentiel, alléger la pression fiscale sur les foyers, réguler les prix de l’énergie et du logement, et redonner de la marge de manœuvre aux citoyens.
Car sans respiration financière, il ne peut y avoir ni croissance, ni stabilité sociale, ni confiance dans l’avenir.