
Imaginez vous, encore ensommeillé, quittant votre appartement un matin pour se rendre à votre travail. Le quartier s’éveille lentement, les commerçants ouvrent leur devanture et les bus s’enchaînent sur l’avenue. Votre café à la main, vous vous arrêtez brusquement : un portefeuille gît sur le trottoir, grand ouvert, dévoilant une liasse de billets impressionnante. Autour de vous, personne ne semble avoir remarqué l’objet. Le cœur battant, vous le ramassez en jetant des coups d’œil nerveux aux passants puis vous ne tardez pas à vous demander : « Que faire maintenant ? ». Un sentiment mêlé d’affolement et d’excitation vous envahit : et si cette découverte bouleversait votre journée de la manière la plus inattendue qui soit ?
Que dit la loi française ?
En France, la manière de gérer l’argent trouvé repose en partie sur l’article 2276 du Code civil. Celui-ci indique que la personne ayant égaré un bien conserve le droit de le réclamer jusqu’à trois ans après la perte ou le vol. Concrètement, si vous trouvez un billet sur un trottoir, vous n’en devenez pas automatiquement le propriétaire légitime : le détenteur initial peut engager des démarches pour récupérer sa mise.
La marche à suivre pour rester dans les règles est simple : dès qu’une découverte a lieu, il est recommandé de se rendre dans un commissariat de police ou une gendarmerie à proximité. La somme y sera consignée, puis généralement transférée à la Caisse des dépôts et consignations, où elle restera en attente du propriétaire légitime. Cette étape peut s’accompagner d’une enquête destinée à vérifier l’origine des fonds, surtout s’ils semblent suspects.
Quand la municipalité prend le relais
Après la mise en sécurité de l’argent, la mairie du lieu de la découverte est sollicitée pour tenter de retrouver son propriétaire. C’est un passage obligé : affichage d’avis, vérification de plaintes pour vol ou perte, etc. Si, au bout d’un an, personne ne s’est manifesté, le « découvreur » est autorisé à récupérer ce pactole. Cependant, la loi impose encore deux années durant lesquelles il doit pouvoir restituer l’intégralité de la somme, au cas où le propriétaire initial se présenterait subitement.
Des sanctions qui peuvent coûter cher
Ne pas signaler ou tenter de dissimuler l’argent trouvé est passible d’un an de prison et de 1500 euros d’amende au maximum. La justice exige également la remise intégrale des sommes soustraites. Dans les scénarios où des doutes persistent (fausse déclaration, incohérences dans le récit de la découverte…), les forces de l’ordre peuvent mener une enquête plus poussée pour confirmer que ce coup de chance n’est pas lié à une activité illicite.
Focus sur le secteur numérique : et si on trouvait un wallet crypto ?
Avec l’essor des cryptomonnaies, un nouveau cas émerge : celui du portefeuille numérique (ou du support matériel) retrouvé dans un espace public. Contrairement aux billets, les cryptomonnaies sont stockées via des clés privées qui permettent de dépenser ou transférer ces actifs. Voici quelques points à garder en tête :
- Difficultés pour identifier le propriétaire : contrairement à une carte bancaire portant un nom, un portefeuille crypto n’indique généralement pas l’identité du détenteur.
- Obligation morale et légale : en cas de découverte d’un matériel contenant des actifs numériques, l’usage en question doit être déclaré. La législation française ne fait pas de distinction radicale entre un bien physique et un bien numérique lorsqu’il s’agit de vol ou de recel.
- Marge d’incertitude : même s’il est délicat de prouver la propriété de certaines cryptomonnaies, la bonne foi reste le meilleur atout pour échapper aux ennuis judiciaires.
Dans ce cas précis il est recommandé de se rapprocher des autorités, voire d’un avocat spécialisé en droit du numérique, peut s’avérer judicieux si la somme en cryptos apparaît conséquente.
Une comparaison avec l’étranger
Selon la juridiction, les règles varient sensiblement. Dans certains pays anglo-saxons, on distingue la notion de « lost property » (bien perdu) de celle de « mislaid property » (bien égaré puis déposé quelque part). Celui ou celle qui trouve un objet mal placé, par exemple dans un café, pourrait être obligé de le remettre à l’exploitant du lieu pour que le propriétaire revienne le réclamer. En Allemagne ou en Suisse, des lois similaires à la France prévoient également des délais de garde, passés lesquels le trouvant peut réclamer une compensation ou la propriété du bien. Dans tous les cas, la déclaration rapide demeure le principe clé afin d’éviter les soupçons de vol ou de recel.
Prudence et démarche officielle
Découvrir de l’argent dans la rue peut sembler être une aubaine. Cependant, la législation française insiste sur le respect d’un processus précis : contacter les autorités, permettre les recherches du propriétaire et, éventuellement, patienter plusieurs mois avant de pouvoir jouir de la somme. Cette approche encadre la circulation de fonds d’origine inconnue et protège à la fois le découvreur et l’éventuel propriétaire. En définitive, la transparence reste le meilleur conseil pour éviter des ennuis judiciaires et, parfois, bénéficier d’une récompense bien légitime.