
Le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, a lancé un appel fort et symbolique ce 11 avril 2025 : « Agissons plus vite et plus fort » pour faire avancer l’euro numérique. Ce message, relayé dans les grands médias comme BFM TV et Boursorama, vise à réveiller l’Europe sur un projet encore au stade exploratoire : Cash+, l’initiative de la Banque centrale européenne (BCE) pour créer une version digitale de l’euro.
Mais au-delà du ton martial, y a-t-il vraiment du nouveau ? Ou s’agit-il d’un simple coup de pression pour éviter l’inertie ?
Une déclaration politique musclée, mais peu d’avancées techniques
Dans son discours, Villeroy de Galhau appelle les décideurs européens à passer à la vitesse supérieure. Selon lui, le danger n’est pas d’agir trop vite, mais de ne rien faire, face à la concurrence croissante des géants de la tech et des monnaies numériques étrangères comme le yuan numérique ou les stablecoins privés (USDT, USDC…).
Mais en réalité, aucune évolution technique, juridique ou opérationnelle n’a été annoncée. Il s’agit surtout d’un signal fort envoyé à Bruxelles, à Francfort (siège de la BCE), et aux capitales européennes, pour relancer l’engagement politique autour de l’euro numérique.
Le projet Cash+ : une réponse européenne à l’évolution des paiements
Le nom du projet pilote de l’euro numérique est Cash+, porté par l’Eurosystème (la BCE et les banques centrales nationales). L’objectif affiché : proposer une alternative numérique à l’argent liquide, utilisable dans tous les pays de la zone euro, avec des garanties de sécurité, de confidentialité et d’accessibilité.
Contrairement aux cryptomonnaies comme Bitcoin ou l’Ethereum, l’euro numérique ne serait pas un actif spéculatif, mais une monnaie légale garantie par les banques centrales, avec une valeur stable égale à celle de l’euro physique.
Calendrier du projet euro numérique : où en est-on en 2025 ?
Le développement de l’euro numérique se déroule en trois grandes étapes :
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Phase d’investigation (juillet 2021 – octobre 2023) :
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Étude de faisabilité, tests techniques, évaluation des usages.
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Définition des cas d’usage prioritaires : paiements de détail, e-commerce, point de vente, personne à personne.
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Phase de préparation (novembre 2023 – fin 2025) :
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Lancement du projet Cash+.
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Développement d’un prototype, partenariats avec les banques commerciales, définition du cadre réglementaire.
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Choix à venir sur les opérateurs techniques (infrastructures, wallets, interface utilisateur…).
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Décision de déploiement (attendue en 2025-2026) :
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La BCE décidera si le projet entre en phase de mise en œuvre réelle.
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Si validé, un euro numérique pourrait voir le jour entre 2026 et 2028.
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💡 À noter : aucun calendrier ferme n’est arrêté à ce jour, et le projet n’a pas encore de base légale pour être lancé auprès du grand public.
Pourquoi cet appel à accélérer ?
Plusieurs facteurs expliquent cette sortie médiatique du gouverneur de la Banque de France :
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Préserver la souveraineté monétaire européenne face aux solutions de paiement dominées par des acteurs non-européens (Visa, Mastercard, PayPal…).
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Anticiper les usages futurs des citoyens, de plus en plus habitués aux paiements instantanés et mobiles.
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Limiter les risques de fragmentation monétaire, si des solutions numériques privées prennent le pas sur la monnaie publique.
Villeroy de Galhau insiste sur le fait que le grand public ne demande pas l’euro numérique aujourd’hui, mais pourrait l’exiger demain si une crise de confiance survenait. L’idée est donc de préparer les infrastructures maintenant, pour ne pas être pris de court plus tard.
Quelles caractéristiques pour l’euro numérique ?
Même si le projet n’est pas encore finalisé, plusieurs éléments sont d’ores et déjà envisagés :
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Gratuit pour les citoyens, comme le cash.
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Géré par les banques commerciales, pour ne pas déstabiliser le système bancaire.
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Plafond d’utilisation probable, afin d’éviter les transferts massifs de dépôts depuis les banques vers l’euro numérique.
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Paiement en ligne, mobile, sans connexion (y compris hors réseau).
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Interopérabilité totale dans la zone euro.
Cet article ne parle pas des menaces liées au projets et aux pièges que dénoncent certains. Ce texte est le reflet du message transmis par les autorités financières. Pour en savoir plus, recherchez des informations sur les CBDC, MNBC, qui sont les monnaies numériques de banques centrales. De nombreux pays s’y opposent par crainte de perdre la liberté financière…
Faut-il s’attendre à une accélération en 2025 ?
Malgré le ton déterminé du gouverneur, aucune avancée concrète n’est encore officialisée. Son intervention vise surtout à :
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Remobiliser les acteurs institutionnels.
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Préparer le terrain politique, notamment au Parlement européen.
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Mettre la pression sur la BCE, qui reste prudente.
En clair : il ne s’agit pas encore d’un tournant décisif, mais d’un coup de projecteur stratégique pour éviter que le projet ne s’enlise.
Une pression politique sans nouveau jalon technique
Le message de François Villeroy de Galhau est clair : l’Europe ne peut pas se permettre de rester spectatrice dans la révolution des paiements numériques. Mais pour l’instant, le projet Cash+ reste en phase de préparation, sans décision finale sur son lancement.
Côté citoyens et entreprises, il n’y a rien de nouveau à attendre à court terme. L’euro numérique n’arrivera pas avant 2026 au mieux, et seulement si la BCE le valide d’ici fin 2025.