L’industrie 4.0 : le grand défi français

Modifié le - Auteur Par Nantcy L -
L’industrie 4.0 : le grand défi français

INTERVIEW.

Intelligence artificielle, Machine Learning… L’industrie du futur se construit via le numérique. Pour rester compétitives à l’ère de la révolution industrielle 4.0, les entreprises n’ont pas d’autres choix que de se réinventer. En ont-elles véritablement les moyens et quelles en sont les conséquences économiques et sociales ? Éclairage de Denis Cerisola, directeur de Business Consulting Group, société spécialisée dans la transmission d’entreprises.

 

« Porter la France au premier rang de la compétition mondiale en écrivant une nouvelle page de son récit industriel. » Tel est l’objectif donné dès 2013 par le président de la République, note le site du gouvernement. Dans un nouveau contexte « où l’offre de produits et de services doit s’adapter à la demande du consommateur en temps réel », les industriels ont de nouveaux défis : incorporer de nouveaux apprentissages, créer de nouveaux modèles d’affaires, réétudier leurs modes d’organisation, de conception et de commercialisation, et déployer l’offre technologique des nouveaux objets connectés.

Le projet Industrie du futur, présenté le 18 mai 2015 par Emmanuel Macron, a pour but d’inciter « les entreprises à moderniser leurs outils industriels et transformer leur modèle économique en franchissant le Rubicon de la stratégie numérique », peut-on lire sur le site gouvernemental.

Un défi conséquent pour la France, qui, grande puissance industrielle par le passé, a perdu la moitié de son économie industrielle en 40 ans. Les entreprises ont-elles les moyens de relever ce challenge ? Qu’en est-il des conséquences économiques et sociales de cette transformation ?

Révolution industrielle 4.0 : un début difficile

Si l’industrie connectée est devenue un standard incontournable dans tous les domaines d’activités, les projets de transformation digitale peinent à voir le jour.

Une forte désindustrialisation de la France

« L’industrie, c’est le nerf de la guerre », assure Denis Cerisola, directeur de Business Consulting Group, société spécialisée dans la transmission d’entreprises. « Or, l’industrialisation a chuté très fort dans l’Hexagone durant ces dernières décennies. La part de l’industrie ne représente plus que 12,4% dans l’économie française, là où elle représente 20,3% en Allemagne et à 15 et 17% en Espagne et Italie. Et qui dit moins d’industrie, dit moins d’emploi. D’autant qu’un emploi industriel génère deux emplois induits.

Pour rappel, « l’industrie 4.0 découle d’un long processus de révolutions industrielles ayant toutes engendré des transformations sociétales majeures », indique l’expert.

La première, qui date de 1780, est celle de la mécanisation avec la « machine à vapeur » : elle va produire pour la première fois de l’énergie à volonté pour la production et les transports. Les ateliers et établis des artisans sont remplacés par l’usine.

La deuxième est celle de l’électrification avec la « machine-outil » : elle reproduit les mouvements de la main de l’homme et en amplifie leur force.

La troisième est celle de l’automatisation : dès les années 50, apparaît la programmation. La machine à commande numérique et les robots voient le jour.

La quatrième se profile avec le « machine learning » : « Aussi nommée usine du futur ou French Fab, l’industrie 4.0 consiste à lier les machines industrielles, les robotiques à l’Intelligence Artificielle (IA) », explique le fondateur de Business Consulting Group. Cela permet à l’industrie d’être encore plus automatique grâce à des prises de décision reposant sur la data. La visée est ici de surveiller et contrôler en temps réel les machines et équipements en installant des capteurs (IA) à chaque étape du processus de production », détaille-t-il. « Le gain de temps est considérable. Avant, pour construire une voiture, il fallait environ 12 ans, entre l’idée et la sortie. Aujourd’hui, ce temps est réduit par 4 ou 5. Par exemple, en un an ou deux, Renault sait lancer e un nouveau modèle. »

Industrie 4.0 : la France à la traîne

Selon une étude de la société d’études de marché YouGov pour le Handelsblatt Research Institute et l’entreprise technologique TeamViewer, la modernisation de l’industrie peine à s’installer en France. Uniquement 1/3 des entreprises affirment avoir commencé à digitaliser leurs processus logistiques. Pis, seules 4 % l’ont initiée concrètement. Les premiers freins cités sont le coût des solutions technologiques, le temps nécessaire à l’implémentation et la sécurité informatique.

Alors que certains experts et pays parlent déjà de l’industrie 5.0…

Quid des impacts sociaux, politiques ou environnementaux ?

Industrie 4.0 : une société à repenser

Cette nouvelle manière de produire crée de nouveaux enjeux, autant politique que sociaux.

Industrie 4.0 : un manque criant de personnel

« Il faut parvenir à attirer les jeunes et les femmes vers le monde du logiciel et de l’industrie. Le chemin est encore long, car aujourd’hui, nous faisons face à une fuite des talents vers l’étranger. En France, les informaticiens et développeurs Web sont payés 7 à 8 fois moins qu’aux États-Unis », déplore Denis Cerisola. La pénurie de main d’œuvre qualifiée bloque ainsi les entreprises qui ont des idées, puisqu’elles manquent de personnel technique.

L’accompagnement des salariés actuels et la formation des futurs salariés doivent donc urgemment être prise en compte. « Le chemin est encore long », regrette-t-il.

Cependant, « les emplois ne sont pas menacés puisqu’en amont de ces nouveaux processus, des ingénieurs et informaticiens surveillant les logiciels doivent intervenir. La digitalisation permet de réduire le temps de process et de fabrication et donc la productivité, et surtout une productivité sans faille. Sans cela, 30% des produits sont à mettre au rebut. Une perte considérable », selon lui.

Industrie 4.0 : « Des moyens forts et constants doivent être avancés »

« La France dispose d’idées et de talents, mais n’investit pas suffisamment en eux. Les pôles de recherches sont assez forts et permettraient d’accélérer cette nouvelle industrialisation, mais il faut y consacrer davantage de moyens, en permanence. Car tout évolue très vite. L’argent doit être utilisé à bon escient, notamment dans la formation des jeunes et dans les salaires », estime l’expert. Et de conclure : « L’industrie 4.0 est une notion de marketing, qui peut se définir par une osmose (de data) entre les meilleures entreprises qui lient toutes les technologies : IA, Manufacturing exécution system (MES), etc, afin d’automatiser toute la chaîne de production. C’est accessible à toute entreprise qui s’en donne les moyens.»

Comment notre activité industrielle va réussir à faire face à cette période de sobriété à venir ?

Par Nantcy L

Journaliste plurimedia depuis 15 ans, je m'intéresse à différents univers : économie, lifestyle, société, culture, psycho & développement personnel... Pour Comparateurbanque.com je vous livre, à l'aide d'experts, des conseils pour mieux gérer votre argent.

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