Fin du cash : sous prétexte de drogue, Darmanin prépare la fin de la liberté financière

Publié le - Auteur Par Tony L. -
Fin du cash : sous prétexte de drogue, Darmanin prépare la fin de la liberté financière

La récente proposition du garde des Sceaux Gérald Darmanin de supprimer l’argent liquide « pour mettre fin aux points de deal » a déclenché l’ire des défenseurs des libertés. Auditionné par une commission d’enquête sénatoriale sur la délinquance financière, Darmanin a plaidé pour « la fin de l’argent liquide » afin de lutter contre le trafic de stupéfiants. Officiellement présentée comme une « mesure assez simple » pour « compliquer la vie des dealeurs », cette sortie est aussitôt perçue comme un ballon d’essai visant à tester l’acceptation d’une restriction majeure des libertés. Bien qu’il affirme être « réaliste » – cette idée n’étant pas applicable « à court terme » – le ministre de la Justice entend clairement préparer les esprits à la disparition future du cash. En filigrane, c’est toute la liberté financière des citoyens qui est questionnée.

Un ballon d’essai pour restreindre les libertés

Cette manœuvre s’inscrit dans une logique politique inquiétante. En lançant publiquement une telle proposition, Darmanin envoie un signal fort aux médias et à la population. Certains observateurs l’interprètent comme l’amorce d’un débat plus large sur la fin des espèces. Comme le montrent ses propres propos, il distille l’idée sans la concrétiser immédiatement – « on n’en a pas les moyens politiques » et il faudra « une longue discussion avec les Français ». Le message est clair : l’abolition du cash est présentée comme une solution ultime, quitte à laisser entendre qu’« une fois l’argent traçable […] c’est plus compliqué […] de pouvoir échapper totalement » aux contrôles. Cette rhétorique, qui laisse entendre que seuls les malfaiteurs utiliseraient de l’argent liquide, sert à faire passer l’idée comme inévitable. En réalité, il s’agit d’un mise en condition de l’opinion publique, visant à légitimer une attaque contre nos libertés économiques sous couvert de sécurité. On peut craindre que ce ne soit qu’un premier pas vers une Europe sans espèces, déjà évoquée dans les milieux européistes.

Libertés individuelles et vie privée en sursis

Supprimer les espèces, c’est fondamentalement remettre en cause la souveraineté individuelle. La Déclaration des droits de l’homme de 1789 rappelle que les droits naturels de l’homme sont « la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l’oppression ». Or la monnaie liquide incarne précisément ces droits : être payé ou payer en cash garantit un niveau d’anonymat et d’indépendance face à l’État. Le droit à la vie privée financière – le droit de gérer son argent sans intervention constante d’un tiers – est ainsi mis en jeu. Selon la CNIL, la généralisation des paiements numériques « soulève des questions majeures en termes de droits fondamentaux, de respect de la vie privée et d’inclusion sociale ». Sans cash, toutes nos transactions quotidiennes seraient tracées et enregistrées par les pouvoirs publics. Les concepteurs de l’euro numérique admettent eux-mêmes que cette monnaie électronique permettrait de « suivre l’historique des paiements de chaque individu » et d’« exercer des restrictions » sur leur usage en cas de crise ou de volonté réglementaire plus stricte. L’impossibilité de recourir à un moyen de paiement anonyme constituerait « un bouleversement majeur pour les libertés individuelles ». Comment ne pas voir là un conflit direct avec les principes constitutionnels français et européens qui protègent la vie privée et la propriété ?

L’argument antidrogue ébranlé par la technologie

L’argument de la lutte contre le trafic de drogue est censé justifier l’initiative, mais il ne résiste pas à l’examen technologique. D’une part, Darmanin lui-même concède que la fin du cash « empêchera la constitution de points de deal » mais « n’empêchera pas » qu’il y ait toujours de la drogue, tout en estimant que la traçabilité compliquera les transactions illicites. Autrement dit, on n’élimine pas le trafic, on le pousse dans d’autres canaux. D’autre part, la réalité est que les narcotrafiquants s’adaptent déjà, ils ont massivement recours aux crypto-monnaies et aux paiements électroniques non régulés. En supprimant le cash, on ne fait que les encourager à se tourner vers des solutions numériques alternatives. Plutôt que de résoudre le problème, la mesure risque de déplacer le trafic dans l’ombre d’autres moyens d’échange, là où la législation nationale a peu de prise. La lutte contre le narcotrafic est une volonté politique et nécessite une coopération transnationale, des outils d’enquête, pas l’éradication des billets et pièces du porte-monnaie des citoyens honnêtes.

Vers l’euro numérique et un contrôle absolu

Cette déclaration pourrait très bien s’inscrire dans une dynamique européenne déjà engagée, c’est-à- dire l’instauration prochaine d’un euro numérique. Christine Lagarde, présidente de la BCE, a confirmé que cette monnaie numérique de banque centrale serait opérationnelle dès octobre 2025. Cette échéance pourrait sonner, en pratique, la fin de l’argent liquide en Europe. Officiellement, l’euro numérique doit « compléter » les moyens de paiement et garantir une forme de confidentialité, d’où l’appellation de « billet numérique ». Mais plusieurs responsables et analystes mettent en garde : derrière cette promesse se cache un système hyper-centralisé. Les textes mentionnent déjà la possibilité de bloquer des transactions, de limiter les dépenses dans certains secteurs ou même de ponctionner automatiquement les comptes en cas de crise bancaire. Le lancement d’un tel instrument serait donc un changement radical : la Banque centrale européenne aurait en théorie le pouvoir de surveiller tous les flux et de geler à distance les avoirs des particuliers. Devant cette perspective, plusieurs élus européens parlent d’un « contrôle absolu » des citoyens et d’un instrument potentiellement « dangereux pour la liberté ». Dans ce contexte, l’appel de Darmanin apparaît clairement comme une étape préliminaire : il prépare l’acceptation collective de la monnaie électronique totale, sur fond d’objectifs sécuritaires affichés.

Surveillance de masse et précédents dangereux

Les dérives potentielles sont multiples et déjà tangibles ailleurs. En Chine, la monnaie numérique de banque centrale (e‑CNY) est testée depuis 2020 dans le cadre d’un système entièrement centralisé. Trois centres pilotés par la Banque populaire de Chine quadrillent les utilisateurs et les flux d’e‑CNY : certification des identités, enregistrement des transactions, analyse des mégadonnées et surveillance des paiements. Ce modèle autoritaire s’intègre dans un vaste dispositif de « crédit social », où les transactions des citoyens sont scrutées en permanence et où leur liberté de dépenser peut être sanctionnée. Le parallèle est glaçant : remplacer le cash européen, c’est ouvrir la voie à un contrôle similaire sous l’égide d’une autorité centrale. Plus récemment, l’Inde a montré le danger de décisions soudaines contre le cash. En novembre 2016, la démonétisation brutale de 86% des coupures en circulation a plongé le pays dans le chaos économique et humanitaire. Les plus pauvres et les petits commerçants, dépendant du liquide, ont payé un lourd tribut pour une mesure qualifiée de « coup de poker » non préparé. À Chypre en 2013, la crise bancaire a dévoilé ce qu’un système sans cash permettrait : il a suffi d’ordonner une ponction sur les comptes pour renflouer les banques, les épargnants n’ayant aucun refuge liquide. Dans un tel système, l’individu n’a plus aucune marge de manœuvre, en cas de désaccord politique ou de nouvelle crise, l’État pourrait simplement couper l’accès à votre argent digital. Les exemples historiques et contemporains plaident donc pour la plus extrême prudence.

La primauté de l’individu sur l’État

Au-delà des considérations techniques, c’est un principe démocratique fondamental qui est en jeu. La liberté financière, c’est l’un des piliers de l’autonomie citoyenne, chacun doit pouvoir décider de l’usage de son argent, dans le respect de la loi, sans surveillance intrusive de l’État. Comme le souligne Darmanin lui-même, « l’argent liquide offre aussi des avantages, une liberté individuelle où l’État ne regarde pas tout à tout moment ». Ce droit n’est pas accessoire, la Constitution française et les conventions internationales protègent le droit de propriété et la vie privée. Permettre à l’État de contrôler entièrement la monnaie reviendrait à instaurer un régime de surveillance perpétuelle. Ce n’est pas un hasard si les militants de la liberté numérique et certains experts économiques tirent la sonnette d’alarme. L’attaque contre le cash n’est pas une bataille technique, c’est un combat politique et philosophique : il s’agit de décider si le citoyen conserve ou non le dernier espace de liberté économique hors du contrôle direct du pouvoir. Le garder est, pour une société démocratique, un impératif absolu.

En ces temps de raison troublée et de polémiques orchestrées, le citoyen ne doit pas se laisser endormir, sous couvert sécuritaire, c’est sa souveraineté des individus qu’on attaque. La suppression programmée du liquide, liée à la poussée de l’euro numérique, apparaît comme un projet à haut risque démocratique. Résister à ce mouvement, c’est défendre la liberté individuelle et le droit de disposer de son argent sans intrusions abusives.

Sources : déclaration de Gérald Darmanin devant le Sénat, bfmtv.com, lefigaro.fr, comcomparateurbanque.com, textes constitutionnels et travaux de la CNIL sur les droits fondamentaux, legifrance.gouv.fr, linc.cnil.fr

Connexe : Quels sont les meilleurs pays pour ouvrir un compte bancaire offshore en 2025 ?

Par Tony L.

Passionné de technologie, Tony vous propose des articles et des dossiers exclusifs dans lesquels il partage avec vous le fruit de ses réflexions et de ses investigations dans l'univers de la Blockchain, des Cryptos et de la Tech.

Laisser un commentaire