Revenu universel : solution d’avenir ou perte d’autonomie ?

Publié le - Auteur Par Emmanuelle Audibert -
Revenu universel : solution d’avenir ou perte d’autonomie ?

Thomas More, dans L’Utopie publié en 1516, imagine un revenu universel pour les habitants de l’île. Cette idée est reprise par certaines personnalités comme Emmanuel Macron qui a défendu l’instauration d’un revenu universel d’activité. Ou encore Benoît Hamon, membre du parti socialiste à l’élection présidentielle de 2017, le revenu universel représente, selon lui, une protection sociale. Ce concept utopique a traversé le temps. Nous analysons ces idées et ces limites. 

Le revenu universel : Une idéologie ?

Le revenu universel ou revenu de base consiste à verser à chacun des membres d’une communauté nationale, un revenu mensuel. Cette somme serait versée sans condition, c’est-à-dire sans tenir compte de leurs revenus, de leur patrimoine ou de leur situation professionnelle. Il est calculé de manière à satisfaire les besoins de base et serait cumulable avec d’autres formes de revenus, comme les salaires. 

Un Nouveau Monde plus inclusif 

Le revenu universel repose sur cinq piliers

  • Il est universel. Il est versé à la totalité des citoyens, sans distinction.
  • Il est individuel. Il n’est pas versé à un ménage, mais à chaque individu. 
  • Il est inconditionnel. Aucune justification n’est à fournir.
  • Il est cumulable. Même si les individus touchent un salaire, ils recevront la même somme. 
  • Il est régulier. Il est versé à des intervalles réguliers. 

L’objectif du revenu universel est de lutter efficacement contre la pauvreté. Les cinq conditions permettraient de pallier les difficultés des aides sociales actuelles. Par exemple, l’automaticité du versement évite les longues procédures administratives, qui découragent les plus démunies à demander les ressources comme le revenu de solidarité active (RSA). Le fait qu’il soit cumulable lutte contre les trappes à inactivités, en incitant les individus à avoir une activité professionnelle. 

Partager et équilibrer pour créer un monde meilleur 

L’avantage de ce système est qu’il permet d’apporter une sécurité matérielle à tous. En effet, comme chaque individu toucherait la même somme, ça créerait une égalité salariale. Chaque personne serait ainsi beaucoup plus intégrée dans la société. Ce qui réduit considérablement l’exclusion sociale. 

Le revenu universel vise à fusionner plusieurs minima sociaux comme la prime d’activité et le revenu de solidarité active (RSA). Il n’y aurait plus de débat autour des aides sociales, de décalage entre les ressources des individus. À l’intérieur de ce concept, tous les citoyens ont la même base de revenus, chacun est libre de l’agrandir ou de vivre qu’avec cette base. Il laisse la chance à chaque individu d’orchestrer sa vie comme il l’entend. Le travail ne serait pas la finalité de la vie, mais un choix. 

Ce système prône l’égalité et la liberté de chaque membre, il paraît merveilleux. En réalité, il présente de nombreuses limites. Ce système n’est pas encore mis au point, les partisans ne sont pas unanimes, le fond pour le financer n’est pas clair… Nous allons exposer une approche plus psychologique des limites de ce projet. 

Le revenu Universel : la perte d’autonomie et de liberté 

En effet, le revenu universel semble plus égalitaire, mais on peut se questionner sur la dépendance des individus envers l’État

Les différentes limites du revenu universel 

Le revenu universel maintient les individus dépendants au revenu de base. Chaque individu, même s’ il a un salaire, est dépendant de l’Etat. Puisque le revenu universel dépend du budget gouvernemental, il est soumis à des variations et dépend des entrées d’argent. En France, ces entrées viennent principalement des impôts et autres taxes. Ce processus réduit les libertés de chacun.

Un des grands points forts de cette théorie est l’idée selon laquelle les individus n’ayant plus besoin de travailler iraient se livrer à du bénévolat, à l’artisanat… Mais si ça n’était pas le cas. Les bénéficiaires du revenu universel peuvent être incités à ne fournir aucun effort productif. Ce qui réduirait la production de biens et de services, ce qui provoquerait une plus grande pauvreté. De plus, cela maintient les hommes dans un certain confort et ainsi les empêche de prendre des risques dans l’objectif de gagner plus. La liberté passe également par la prise de risque. 

L’égalisation des revenus, outre ses effets sur l’efficacité productive, est de considérer l’importance de la responsabilité personnelle. Si tout le monde était payé de la même manière, quelle que soit la durée ou l’intensité de son travail, non seulement les gens n’auraient aucune incitation à travailler, mais cela semblerait pour certains violer un principe de justice : le principe de responsabilité personnelle (Dworkin 1981 ; 2000 ; Un Nathan 1989 ; Van den Brooke 2001). Il faut aider les moins fortunés et récompenser les efforts individuels.

Une avancée de plus vers le crédit social 

Dans la même logique de revenu universel, il existe le crédit social aussi appelé dividende universel est une idéologie et un mouvement social qui est apparu dans les années 20. Il est basé sur une théorie de l’ingénieur écossais Clifford Hugh Douglas. Tous les individus reçoivent chaque année un total de monnaie créée proportionnel à la croissance des biens et des services. Ainsi que l’investissement qui est proportionnel au nombre de citoyens de la zone monétaire. Un exemple d’application de cette idéologie est le crédit universel britannique qui sous couvert de simplification n’a fait qu’aggraver la précarité. Et il a également renforcé le contrôle des plus vulnérables. Ce n’est donc pas un exemple à suivre. 

 

Une question/une réponse philosophique  

Quel est l’impact sur le faible revenu ?

Le revenu disponible est calculé sur le salaire brut. Le cumul des allocations universelles et des revenus fait qu’une partie de la population bénéficiera de cette aide tout en travaillant, mais ne sera pas imposable. Selon les circonstances antérieures et le type de financement, ce fait peut entraîner des coûts supplémentaires pour l’État. Cela conduira à une augmentation relative des bas revenus, et donc du système de classification des salaires. L’abaissement du seuil d’exonération d’impôt peut limiter cet impact.

Comment cela affecte-t-il les forts revenus ?

Dans le cadre du plan envisagé, l’introduction d’allocations universelles pourrait entraîner une augmentation des impôts payés par les plus riches, de sorte qu’en fin de compte leurs revenus n’augmenteront pas. De son côté, l’économiste de l’OFCE Guillaume Allègre attire l’attention sur le coût d’un revenu de base pour les revenus les plus élevés : « Le coût du revenu le plus élevé, en fonction du montant du revenu de base est triple : ils doivent financer le revenu de base lui-même, l’offre de main-d’œuvre peut baisser et les bas salaires peuvent augmenter. Les transferts réalisés par un revenu de base suffisamment élevé peuvent être très importants, le fondement de la politique doit donc être solide. »

Quels effets sur l’emploi ?

Le mécanisme du revenu de base est contradictoire. Alors que certains cherchent à favoriser l’emploi pour tous en supprimant le piège de l’inactivité, d’autres parlent de libérer les personnes du besoin d’emploi. Le Québécois Groulx conclut : « Nous sommes face à un paradoxe où le revenu universel se justifie sur la base de cadres idéologiques opposés ; il devient capable de produire des avantages en eux-mêmes opposés, sinon contradictoires. »

L’Etat français est-il capable de financer ? 

Même si l’idée d’un revenu universel français est séduisante, encore faut-il pouvoir le financer. Selon le rapport d’information du Sénat du 13 octobre 2016, le coût « total » d’un revenu universel serait compris entre 30 et 700 milliards d’euros (selon que le revenu universel est compris entre 500 et 1 000 euros par mois). Cependant, ce coût serait inférieur si le revenu universel « supprime et remplace » les prestations existantes. Par conséquent, le coût réel dépend du degré de substituabilité des prestations sociales existantes.

Par Emmanuelle Audibert

Rédactrice en école de journalisme à Aix-en-Provence

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