Depuis quelques semaines, un projet défendu par Elon Musk suscite une curiosité grandissante aux États-Unis. À la tête d’un nouveau Département dédié à l’efficacité gouvernementale (Department of Government Efficiency, surnommé « D.O.G.E. » en référence à la cryptomonnaie Dogecoin), Musk propose de mettre la technologie blockchain au service de l’Etat afin de suivre les dépenses fédérales et rationaliser l’ensemble des processus administratifs.
Dans le sillage de cette proposition, la question se pose désormais : la France serait-elle prête à accueillir un dispositif similaire ?
Des dépenses faramineuses souvent incontrôlées
Le Département dirigé par Elon Musk a été créé en réaction au montant colossal des dépenses publiques américaines, estimées à 6,7 trillions de dollars pour l’année fiscale 2024. Donald Trump, fraîchement élu, avait qualifié ce niveau de dépenses de « gaspillage » et affichait l’objectif de réduire cette somme à 2 trillions de dollars au maximum. Dès sa création, le D.O.G.E. s’est donc concentré sur l’idée d’employer des méthodes novatrices pour renforcer la transparence des flux financiers, tout en réduisant les coûts liés à la bureaucratie.
C’est dans ce cadre que Musk a évoqué l’intérêt d’un registre numérique permettant d’enregistrer chaque transaction de manière infalsifiable. Selon plusieurs sources relayées par Bloomberg, le recours à la blockchain aurait été mis en avant comme solution avantageuse pour assurer une gestion rigoureuse des budgets, des paiements et même des infrastructures gouvernementales. Des membres de cette nouvelle entité ont entamé des discussions avec différents intervenants de l’écosystème crypto, en particulier des responsables de blockchains publiques déjà bien établies.
Le potentiel de la blockchain
La blockchain est souvent décrite comme un registre distribué et sécurisé. Son principe repose sur des blocs de données chaînés chronologiquement, validés et répliqués par un réseau d’ordinateurs. Une fois enregistrée, une information ne peut plus être modifiée, ce qui renforce considérablement la transparence et la sécurité des données.
Dans le domaine de la gestion publique, une telle architecture pourrait aider à simplifier et rendre plus fiables des procédures parfois lourdes : suivis de dépenses, élaboration de contrats publics, traitement des subventions ou encore gestion de l’identité numérique des citoyens. Au lieu de dépendre d’un système bureaucratique traditionnel, chaque département ou ministère pourrait s’appuyer sur un réseau décentralisé, réduisant ainsi les délais et le risque d’erreurs administratives.
La technologie blockchain, en rendant accessibles et infalsifiables les informations relatives aux transactions, peut donc contribuer à rendre plus visibles les flux financiers et ainsi réduire les risques de comportements illégaux. Lorsqu’un système de comptabilisation publique s’appuie sur une architecture décentralisée, chaque paiement ou dépense est inscrit dans un registre consultable par des organismes de contrôle ou par des observateurs extérieurs autorisés. Cette traçabilité accrue complique la tâche de toute personne cherchant à manipuler ou dissimuler des informations. Ce qui peut être un atout dans la mesure où l’on cherche réellement à traquer toutes dépenses opaques.
Les avantages attendus pour la gestion fédérale
En optant pour un outil blockchain, le D.O.G.E. cherche avant tout à consolider trois aspects :
- La transparence : toute dépense et toute transaction apparaîtraient dans un registre ouvert à la consultation (dans les limites de la confidentialité nécessaire pour certains sujets sensibles). Les responsables publics et les citoyens pourraient alors contrôler plus aisément l’usage des fonds.
- La fiabilité : une base de données décentralisée limite les possibilités de falsification ou de fraude. Les opérations sont validées par le consensus d’un grand nombre de nœuds, ce qui diminue le risque d’erreur humaine ou de manipulation.
- La réduction des coûts : un système automatisé via des contrats intelligents pourrait diminuer les frais administratifs, tout en accélérant les transferts et l’exécution des tâches. Par exemple, la gestion immobilière des bâtiments fédéraux ou le paiement des prestataires publics pourraient être simplifiés par l’utilisation d’un smart contract.
Le cas spécifique du Dogecoin
Le surnom « D.O.G.E. » n’est pas un hasard : Elon Musk est connu pour son engouement envers le Dogecoin (DOGE), cryptomonnaie d’abord créée comme une plaisanterie en 2013. Malgré son origine atypique, Dogecoin est devenu un acteur de poids dans l’univers crypto, notamment grâce au soutien régulier que Musk lui apporte, lui permettant de classer dans le top 10 mondial du market cap.
Plusieurs représentants de blockchains publiques ont rencontré les équipes de ce nouveau Département, ce qui laisse entendre que le Dogecoin n’est pas la seule option sur la table. Ethereum ou d’autres blockchains plus anciennes et déjà éprouvées pourraient également être intégrées aux réflexions. Il n’en demeure pas moins que l’association D.O.G.E.-Dogecoin attire l’attention, et certains observateurs y voient une volonté de promouvoir davantage cette cryptomonnaie populaire.
Cela serait-il envisageable en France
L’hypothèse d’une application de ce type de solution en France n’est pas fantaisiste. Le pays a déjà manifesté de l’intérêt pour la blockchain à travers différents projets, notamment dans le secteur financier et la gestion du vote électronique pour des élections internes à certains organismes. En théorie, la France pourrait explorer une solution similaire pour ses dépenses publiques. Grâce à un registre immuable, le gouvernement et les collectivités territoriales disposeraient d’un meilleur outil de suivi des budgets.
Les citoyens, de leur côté, gagneraient en visibilité sur la gestion des deniers publics et sur l’utilisation de leurs impôts et différentes taxes, ce qui serait un énorme bon pour réhabiliter le rôle du gouvernement aux yeux des français. Une telle transformation nécessiterait cependant une adaptation des cadres législatifs et réglementaires. Et puis il serait aussi nécessaire d’aligner toutes les parties prenantes sur une réforme de cette ampleur. Les institutions publiques, les acteurs privés et les citoyens doivent être convaincus des bénéfices d’un tel dispositif. L’acceptation de ce concept pourrait prendre du temps, même si une phase d’expérimentation à petite échelle pourrait servir de tremplin.
Alors, qu’attendons nous pour assainir les dépenses publiques ?
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